Selon une étude récente de la Commission Européenne (en anglais), le comportement financier des gens a tendance à être basé sur « (leurs) attributs psychologiques intrinsèques plutôt que (sur leurs) connaissances ou compétences », et est fortement biaisé par des facteurs émotionnels ou cognitifs. Les techniques de vente telles que le cadrage et l’ancrage sont souvent utilisées afin d’exploiter ce fait.
Avec la complexification croissante des produits d’investissement de détail, ceci est particulièrement alarmant. Les produits de l’ingénierie financière sont en vente auprès de presque toutes les grandes enseignes bancaires, mais le rapport indique qu’ qu’au lieu de devenir des consommateurs plus rationnels, nous agissons de manière aussi irrationnelle que nous l’avons toujours fait.
C’est pourquoi l’UE cherche à légiférer de manière à simplifier et réduire la quantité de jargon accompagnant ces produits, et a déjà fait quelques bonnes, quoique modestes, propositions.
Les produits d’investissement de détail (Packaged Retail Investement Products ou PRIPs en anglais) comprennent souvent des produits allant des «equity bonds », nom pour le moins portant à confusion, aux produits dérivés et autres instruments financiers des plus exotiques, normalement réservés aux traders professionnels. Pour plus de détails sur ce marché et pour les recommandations de Finance Watch quant à ce que les petits investisseurs individuels devraient savoir avant d’acheter un PRIP, lisez notre rapport, “Vers une meilleure protection des investisseurs ?”.
La difficulté pour les régulateurs est que, comme le montre le rapport, les consommateurs basent leurs choix sur des facteurs aléatoires : nous suivons les conseils de personnes à qui nous faisons confiance peu importent leurs motifs ou expertise –que ce soit le vendeur payé à la commission ou un ami nous conseillant. Une personne sur trois choisit simplement le produit le plus familier, et une sur vingt choisit le premier produit qu’elle trouve. Souvent, ceci sera notre placement principal pour la retraite !
Même ceux qui comprennent ces produits ont souvent du mal à en évaluer les risques, en particulier dans le cas des produits complexes. Un avertissement en petits caractères disant que les investisseurs pourraient perdre de l’argent si la contrepartie du prestataire venait à faire faillite est une chose, mais s’attendre à ce que les petits investisseurs aillent non seulement trouver mais identifier la santé financière de la contrepartie et déterminer le risque qu’elle représente est une toute autre chose. Les agences de notation et les banques elles-mêmes ont du mal à s’y retrouver.
QUELQUES RECOMMENDATIONS
Finance Watch a recommandé que ces nouveaux produits d’investissements complexes offrent le même niveau de protection des consommateurs que les produits plus simples. Entre autres, nous voudrions voir une interdiction de toutes les caractéristiques qui ne sont pas adaptées aux petits investisseurs, comme par exemples les composantes complexes dont le taux de rendement est particulièrement imprévisible.
Nous recommandons aussi que les vendeurs soient plus transparents au sujet des coûts cachés. La beauté des produits structurés – lorsque l’on est une banque- est que les petits investisseurs n’ont aucune idée de leur coût de fabrication. Des produits composés de différents éléments, comme par exemple une obligation et un instrument dérivé combinés pour offrir un certain rendement, peuvent être vendus plus chers que ne pourraient l’être les différentes composantes séparément.
Il est normal pour les vendeurs de s’accorder une marge de profit, mais les consommateurs doivent savoir ce à quoi ils s’engagent. Tout comme les frais, les «marges intégrées» peuvent avoir un impact très fort sur les performances finales, et forment une partie intégrante du cout de détention du produit. Ces marges ne sont pas payées directement par les investisseurs mais sont financées via une réduction du rendement potentiel : par exemple au lieu d’acheter un produit payant 50% de la performance future d’un certain indice boursier, vous obtiendrez 30% de la performance future de l’indice. Comme cette marge est cachée, ou « intégrée », l’investisseur final n’en saura jamais rien.
Finance Watch souhaite que les fournisseurs de produits financiers affichent la « marge théorique à maturité » des produits structurés qu’ils créent. Cette valeur est déjà calculée par les producteurs afin de déterminer les prix, il serait donc facile de la rendre publique et cela aiderait les consommateurs à garder le marché honnête.
Un autre aspect non négligeable des PRIPs est leur impact sur la société. . Les investissements reposant sur l’épargne des particuliers financent une très grande partie de l’économie réelle, et beaucoup de petits investisseurs aiment à penser que leur épargne finance emplois et entreprises. Ce n’est pas toujours le cas des PRIPs, qui tiennent parfois plus du pari spéculatif que de l’investissement (par exemple un produit lié au cours de l’or ou au taux d’inflation).
Nous sommes habitués à voir les contenus en sel et graisses des produits alimentaires indiqués clairement sur les étiquettes – il n’en est rien dans l’industrie financière. Le marché des PRIPs est énorme -9 000 000 000 000 d’Euros en 2009-, il semble donc inévitable que leurs « contenus en sel et graisses » aient un impact sur l’économie réelle. Finance Watch recommande que les PRIPs soient étiquetés comme étant des «investissements » ou des « paris », afin que les investisseurs puissent décider pour eux-mêmes en toute connaissance de cause s’ils veulent que leur argent aille alimenter l’économie réelle ou non.
Pour plus de détails sur la différence entre investir et parier, lisez la page 20 du rapport.